Un nouveau contributeur débarque dans cette rubrique et s’essaye à l’exercice : bpfeuty
Cette semaine, c'est à mon tour de vous proposer un plan qui change tout. Et il est extrait d'un film qui fut très attendu et qui a beaucoup déçu. J'ai nommé :
Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal (quel joli nom) est un film d'aventures, d'images de synthèse et de marmottes datant de 2008, réalisé par Steven Spielberg sur une gribouille de David Koepp et avec Harrison Ford (la plus grosse tête sur l'affiche).
Pour ceux qui auraient la chance de ne pas connaître ce film mais qui voudrait quand même en savoir plus, voici un lien vers sa fiche IMDB : Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal (IMDB)
Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal, au cas où vous l'ignoriez, est le quatrième opus d'une saga d'aventure cultissime. Alors certes, nous ne saurons jamais exactement ce qui fait qu'un film deviendra culte ou non (même pas la qualité : tous les bons films ne sont pas cultes et tous les films cultes ne sont pas bons) mais le fait est qu'un film devient culte notamment grâce à des détails (dialogue, scène, ou plan), des éléments marquants.
Lorsqu'un film culte a droit à une – ou plusieurs – suite (une vraie, pas un bidon de lessive fait pour laver notre petit cerveau qui a désespérément besoin de Coca-Cola ® pour vivre), ces éléments marquant deviennent des codes pour la saga, codes qui doivent apparaître dans chacun des films de la saga, bien entendu.
Dans le cas d'Indiana Jones, il y a de nombreux éléments qui reviennent dans chacun des films. Mais dans le cadre de cette étude (très sérieuse), je vais m'intéresser au début de chacun d'eux.
On commence logiquement par le premier, Les Aventuriers de l'Arche Perdue.
Le film s'ouvre traditionnellement sur la présentation du logo du studio produisant le film, en l'occurrence Paramount, puis un simple mais efficace fondu enchainé fait apparaître une montagne de la même forme que la montagne Paramount. Mais il s'avérera très vite que cette nouvelle montagne fait en fait partie du décor de la scène d'ouverture du film. Ensuite, le héros apparaît devant la montagne. Il est parfaitement reconnaissable, même de dos :
Trois ans plus tard, la suite, Indiana Jones et le Temple Maudit, arrive et le même procédé est utilisé pour ouvrir le film, sauf que la montagne est remplacée par une sculpture de montagne sur un gong. Et c'est ce gong qui fait partie du décor de la scène d'ouverture du film. Et ensuite, notre héros apparaît :
Si si, c'est bien lui, sans chapeau, et on peut voir le fameux gong en haut à gauche de l'image.
Puis il faut attendre cinq ans pour voir Indiana Jones et la Dernière Croisade. Evidemment, le film s'ouvre sur le même procédé que les précédents, mais cette fois-ci, Indy a rajeunit (le Botox ® peut faire des merveilles) :
Ainsi, comme vous pouvez le constater, chacun des trois films s'ouvre de la même manière : logo, fondu enchainé puis apparition du héros.
Puis les années passent et hop, on se retrouve dix-neuf ans plus tard confortablement assis dans un fauteuil devant un grand écran, entouré de centaines de personnes toutes excitées de retrouver si longtemps après leur héros préféré. Les lumières s'éteignent puis le logo apparaît :
Tient, ce n'est pas le même… Petite appréhension parce que ce logo précède déjà quelques films qui ont gâché le plaisir de retrouver un univers culte.
Mais très vite le spectateur se rassure car oui, le code a été respecté :
Puis, en toute logique, suit l'apparition du héros :
Après le Botox ®, les implants capillaires.
Le voilà le plan qui change tout. A ce moment-là rien n’est encore sûr, mais fondamentalement, quelque chose ne va pas : les années d'attente précédant la vision de ce plan ne seront peut-être pas récompensées à leur juste valeur…
Mais revenons à nos moutons (enfin… vous m'avez compris).
Ça serait donc lui, désormais, le héros, cette petite marmotte même pas réelle ? Réfléchissons un instant… Un héros est entre autre le personnage auquel le spectateur s'identifie ; or, en voyant l'image ci-dessus, le spectateur est quelque peu interloqué, tout comme ladite marmotte d’ailleurs. Supposons donc que cette marmotte est le héros de ce quatrième opus et continuons la vision du film.
Nous retrouvons très vite notre héros, accompagné de ses proches, et abasourdi de voir passer Indy à toute vitesse sur une fusée sur rails en plein milieu du désert :
Devinez dans quel état est le spectateur à ce moment là ?
Puis il réapparaît. Il voit Indy, notre cher bon vieux Indiana Jones, et il a peur :
Et à ce moment-là, le spectateur a lui aussi très peur en voyant son héros préféré ; il a peur de passer deux très mauvaises heures.
Et malheureusement, cette peur ce confirme…
Non, plus sérieusement, bien sûr que le héros du film est Indiana Jones et voici le premier plan dans lequel on peut le reconnaître :
Et ce plan en dit très long sur ce qu'il est devenu, il n'y a qu'à lire de gauche à droite : certes Indiana Jones est une star, il est connu dans le monde entier, même par ceux qui n'ont jamais vu un seul de ses films, mais maintenant, il n'est plus que l'ombre de lui-même* et à la botte du gouvernement américain, à qui il fait un salut amical.
Ce type qui ne vivait que pour l'archéologie et l'Histoire avec un grand H en essayant de ne pas en faire partie, se retrouve désormais dans l'Histoire et n'est plus capable de prendre du recul. Et ce n'est pas d'avoir évité de justesse l'explosion d'une Bombe H qui va l'aider à retrouver ses priorités d'antan…
En tous cas, j’estime que George Lucas, David Koepp et Steven Spielberg ont réussi l'impossible : tuer un mythe.
Impossible ? Non pas vraiment.
En fait, c'est même tout le contraire. Ils ont tué ce mythe d'une manière très simple :
Le premier n'a pas voulu se prendre la tête à chercher un bon scénario (parce que sa patience atteignait ses limites et il commençait à manquer d'excuses pour sortir des produits dérivés).
Le second n'a pas voulu se prendre la tête à écrire un scénario trop compliqué et préféré rendre une copie où les aventures ne font que se suivre sans autre incidence majeure.
Le dernier n'a pas voulu se prendre la tête à attendre qu'un scénario valable soit pondu car tout ce qui l'intéresse désormais, c'est filmer (heureusement, il filme bien, tout n'est pas perdu).
Tuer un mythe n'est pas impossible. C'est au contraire très simple. Il suffit d'être paresseux.
* Les connaisseurs sauront qu'ici, je suis totalement de mauvaise foi.
6 commentaires:
Très bonne analyse, par contre il doit y avoir une inversion sur la fin dans l'ordre de présentation des trois cadors, puisque Koepp est bien scénariste et Spielberg réalisateur. donc Spielberg n'est pas le dernier mais bien le deuxième.
Bref, très bon article et tellement vrai, quel merde absolu ce film.
Ca devrait aller maintenant.
:-)
soyons clair, j'ai pas vu le film, j'avais pas envie de le voir..ca fait jamais plaisir de voir spielberg se prendre un gadin..ma la tu viens de me donner envie de le voir.
Le problème c'est que Spielberg ne s'est pas pris un gadin au sens propre du terme vu que ce film a fait un véritable carton !
Enfin, c'est pas sa première daube et c'est certainement pas sa dernière vu sa filmo depuis quelques années...
Il s'amuse et c'est tout ce qui lui importe.
En plus, ça rempli les caisses....
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